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23 septembre 2015 – Montréal a eu droit à une célébration de nostalgie et de mélancolie, Alcest était de passage en ville pour nous faire vivre d’intenses émotions. Mais d’abord, deux groupes à des pôles musicaux opposés sont montés sur les planches du Club Lambi, une salle plutôt inhabituelle pour un concert du genre.

Hands of Despair a débuté la soirée en nous présentant son black metal mélodieux en seulement quatre morceaux. Certains se souviennent peut être de leur très bonne prestation il y a quelques mois en première partie de Solstafir. Le groupe a récidivé ce soir en nous offrant encore une fois une prestation technique, précise et franchement réussie. Dès les premières mesures du premier morceau, Sleeper, la section rythmique s’est démarquée par sa finesse et sa dextérité impressionnante. La sonorité de la salle n’était malheureusement pas assez équilibrée pour nous permettre d’apprécier le doigté effarant du bassiste. Le second morceau, une ode à tous ceux qui ont combattu vainement le cancer, a commencé tout en douceur. Le chanteur a alterné aisément chant clair et puissantes vociférations pour faire grimper la tension qui a culminé en un solo de guitare très poignant. Durant les deux derniers morceaux du groupe, le chanteur et le bassiste ont tentés en vain d’activer la foule qui, malgré une musique dynamique, était un peu froide.

Après une très courte pause, Emma Ruth Rundle s’est approchée de son micro, seule, avec sa guitare Gibson sous le bras. Son nom est connu dans le monde du post-rock grâce à sa participation dans le groupe Red Sparrowes. Néanmoins, pour son projet solo, elle s’éloigne légèrement du genre pour courtiser avec la musique folk et ambiante. Elle nous a offert une musique épurée à tous points de vus, à l’exception des effets de distorsion et de réverbation qui la caractérisent. Sa voix parfois puissante, parfois délicate, est venue s’ajouter aux mélodies simples qui ont engouffrées la salle dans une ambiance ésotérique. L’interprétation de son plus grand succès, Shadows of My Name, restera comme l’un des moments forts de ce concert, avec son refrain chargé d’émotion et ses mélodies douces et aériennes.

Dès que Winterhalter, batteur d’Alcest, est monté sur scène pour prendre place derrière sa batterie, la foule s’est éveillée. Les cris et les applaudissements ont résonnés jusqu’aux premières notes d’Opale, le premier simple du dernier album de la formation. C’était la troisième fois que le groupe venait à Montréal, mais seulement la première fois sans encombre. En 2010, Neige, chanteur et membre fondateur du groupe, avait une extinction de voix qui a forcé la formation à donner un concert quasi instrumental. Pour cette raison, la prestation avait dû être raccourcie. En 2013, lors de leur tournée avec Anathema, le groupe était arrivé en retard, ce qui avait bousculé l’horaire de la soirée. Heureusement, cette fois, plus de cinq ans après leur première présence en sol canadien, tout était parfait. Les musiciens étaient assez en forme pour offrir au public un concert de plus d’une heure. Ils ont pioché dans leur discographie de façon équilibrée. Le public a semblé apprécier particulièrement la pièce Là Où Naissent les Couleurs Nouvelles de l’album Les Voyages de l’Âme, les têtes se mettant à hocher frénétiquement et la foule chantant en choeur avec Neige. Malgré son âge, l’album Souvenir d’Un Autre Monde et ses mélodies parfois affables mais souvent mélancoliques ne sont pas tombés dans l’oubli. Le groupe a su démontrer que ce n’est pas sans raison que Les Iris et Souvenirs d’un Autre Monde sont aujourd’hui des incontournables. Avant le rappel, une autre chanson essentielle de la formation française a résonné dans la salle. L’audience a éclaté en un énorme cri synchronisé lorsque les premières notes de Percées de Lumière se sont faites entendre. Ce morceau restera un classique du groupe pour l’énergie qu’il dégage grâce aux vociférations puissantes de Neige ainsi que pour ses mélodies qui paraissent si simples mais pourtant si envoûtantes. Ça a certainement été l’un des moments forts de la soirée. Le tout s’est terminé sur deux chansons en rappel, soit Autre Temps, suivi de la pièce monolithique Délivrance. En somme, une belle soirée éclectique et forte en émotions dans une salle étonnante. Le mélange des genres peut sembler étrange sur papier mais ça a certainement fonctionné cette fois !

Auteur: Luc Dubois

Photographe : Thomas Mazerolles